Derrière le sigle RPS (risques psychosociaux) se cache une réalité à la fois complexe et subjective qu’il est nécessaire de prendre en compte pour des raisons tant juridiques, qu’économiques, mais aussi tout simplement sociales.
Une réalité vaste et complexe
Il n’existe pas de définition consensuelle des risques psychosociaux. Ceux-ci recouvrent des réalités très diverses et variées, du stress au troubles musculo-squelettiques en passant par l’insatisfaction au travail ou des conflits, de l’absentéisme etc.
En plus de la dimension multifactorielle des troubles psychosociaux, qui les rend difficile à cerner, l’une des complexités de la question vient de la tendance à mélanger les causes et les conséquences des troubles psychosociaux. Je ne reviendrais pas sur la présentation des risques et de leurs symptômes à court et à long terme, assez bien connus aujourd’hui. Une question reste cependant : pourquoi parle-t-on de prévention des risques, alors qu’il s’agit bien plus souvent de répondre à des troubles déjà existants et installés plutôt qu’à des risques hypothétiques ?
Mieux vaut prévenir que guérir
En effet, la principale difficulté de la prévention des risques psychosociaux réside dans le fait de pouvoir prévoir et identifier les risques, c’est-à-dire avant l’apparition des symptômes qui sont les conséquences et non les causes. Ainsi, peut-on vraiment parler de prévention des risques psychosociaux quand on agit, ou plutôt réagit, face à des symptômes déjà présents ?
S’il est difficile de reconnaître et d’accepter le problème au sein de son entreprise pour des raisons évidentes de réputation, il est nécessaire autant du point de vue législatif que de celui des performances économiques, de savoir s’y atteler au plus vite.
Des raisons fondées et pertinentes d’attaquer de front le problème
En effet, la justice condamne de plus en plus souvent les entreprises en cas d’ignorance des risques psychosociaux, les tenants pour responsables en cas de suicide, de burn-out ou de harcèlement. Les employeurs se retrouvent ainsi face à une réelle obligation de résultat.
Il est d’autant plus stratégique d’attaquer le problème de front que les RPS ont un coût, qui est aujourd’hui chiffré : le mal-être au travail coûterait aujourd’hui 13 500 euros par salarié et par an. Un coût économique, social et sanitaire qui pourrait être largement réduit si les plans d’action mis en place s’accordaient avec la stratégie de l’entreprise dans un travail profond sur ses valeurs, sans se réduire à des mesures cosmétiques.
L’exemple de DuPont de Nemours
DuPont de Nemours est une firme transnationale employant 1300 personnes en France, réparties sur 7 sites et œuvrant dans les secteurs de l’agro-alimentaire, de la chimie, des biosciences et de l’électronique et communication.
Ayant connu de nombreuses restructurations au cours des 15 dernières années, l’entreprise conçoit plusieurs mesures phares :
2004 : la création d’ « Ateliers de Transition » pour accompagner les changements et process de rentabilité vecteurs de mal-être.
2005 : la création d’un poste « Responsable de prévention des risques psychosociaux » : décisif dans les activités de veille, de formation, de médiation, de coordination des différents acteurs et surtout d’activation de prise de décision en cas de dysfonctionnement organisationnel.
2009 : la création d’un comité de pilotage intégrant :
- La Responsable de la prévention des RPS, pilote du groupe.
- Le DRH
- Le médecin du travail du site de la Défense
- 2 infirmières attachées aux sites de Paris et de Mantes la Jolie
- La secrétaire du Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail
- Les délégués syndicaux centraux
La dimension pluridisciplinaire de ce comité de pilotage, son engagement et la sensibilisation de tous les acteurs sont des facteurs clés de réussite du plan d’action mis en œuvre.
Malgré les nombreuses actions de prévention mises en place (cellules d’écoute, formation à la prévention du stress, groupes d’échanges de bonnes pratiques managériales, point d’attention sur les profils « workalcoholic » …), des progrès restent à faire. Ainsi, l’entreprise note que « le fait de n’avoir pas suffisamment associé les partenaires sociaux en amont de la démarche a freiné le dialogue social sur le sujet ». De même, face à l’hétérogénéité des situations selon les différents sites, une organisation globale présente des lourdeurs.
On peut aujourd’hui féliciter la mise en place de telles démarches, qui rappellent que la situation de déni est dépassée. Cependant, force est de rappeler qu’elles nécessitent un travail continu afin d’affiner la conscience des phénomènes sous-jacents toujours complexes à identifier.
Sources :
Mozart Consulting, étude sectorielle de l’IBET (Indice de Bien Etre au Travail), in Les Echos
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